ソシュール『一般言語学講義』註解 #31
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原著: pp. 295-298
小林訳: pp. 305-308
菅田訳: pp. 208-211
町田訳: pp. 298-301
各文の頭についている上付きの数字は、原著の「ページ数-行数」を示しています。
Cours 原文
CHAPITRE II
LA LANGUE LA PLUS ANCIENNE ET LE PROTOTYPE
[…] ²⁹⁵⁻²⁶On peut d’abord penser à l’origine première, au point de départ d’une langue ; mais le plus simple raisonnement montre qu’il n’y en a aucune à laquelle on puisse assigner un âge, parce que n’importe laquelle est la continuation de ce qui se parlait avant elle. […]
²⁹⁷⁻⁷Dans ses $${\textit{Origines}}$$ $${\textit{indo-européennes,}}$$ Ad. Pictet, tout en reconnaissant explicitement l’existence d’un peuple primitif qui parlait sa langue à lui, n’en reste pas moins convaincu qu’il faut consulter avant tout le sanscrit, et que son témoignage surpasse en valeur celui de plusieurs autres langues indo-européennes réunies. ²⁹⁷⁻¹²C’est cette illusion qui a obscurci pendant de longues années des questions de première importance, comme celle du vocalisme primitif. […]
²⁹⁷⁻²⁸En fait il est extrêmement rare que deux formes de langue fixées par l’écriture à des dates successives se trouvent représenter exactement le même idiome à deux moments de son histoire. ²⁹⁷⁻³¹Le plus souvent on est en présence de deux dialectes qui ne sont pas la suite linguistique l’un de l’autre. ²⁹⁷⁻³³Les exceptions confirment la règle : la plus illustre est celle des langues romanes vis-à-vis du latin : en remontant du français au latin, on se trouve bien dans la verticale ; le territoire de ces langues se trouve être par hasard le même que celui où l’on parlait latin, et chacune d’elles n’est que du latin évolué. […] ²⁹⁸⁻⁵Mais l’inverse est beaucoup plus fréquent : les témoignages des diverses époques appartiennent à des dialectes différents de la même famille. ²⁹⁸⁻⁷Ainsi le germanique s’offre successivement dans le gotique d’Ulfilas, dont on ne connaît pas la suite, puis dans les textes du vieux haut allemand, plus tard dans ceux de l’anglo-saxon, du norrois, etc. ; or aucun de ces dialectes ou groupes de dialectes n’est la continuation de celui qui est attesté antérieurement. ²⁹⁸⁻¹²Cet état de choses peut être figuré par le schéma suivant, où les lettres représentent les dialectes et les lignes pointillées les époques successives :
²⁹⁸⁻¹⁶La linguistique n’a qu’à se féliciter de cet état de choses ; autrement le premier dialecte connu (A) contiendrait d’avance tout ce qu’on pourrait déduire de l’analyse des états subséquents, tandis qu’en cherchant le point de convergence de tous ces dialectes (A, B, C, D, etc.), on rencontrera une forme plus ancienne que A, soit un prototype X, et la confusion de A et de X sera impossible.
註解
²⁹⁵⁻²⁶On peut d’abord penser à l’origine première, au point de départ d’une langue ; mais le plus simple raisonnement montre qu’il n’y en a aucune à laquelle on puisse assigner un âge, parce que n’importe laquelle est la continuation de ce qui se parlait avant elle.
²⁹⁷⁻⁷Dans ses $${\textit{Origines}}$$ $${\textit{indo-européennes,}}$$ Ad. Pictet, tout en reconnaissant explicitement l’existence d’un peuple primitif qui parlait sa langue à lui, n’en reste pas moins convaincu qu’il faut consulter avant tout le sanscrit, et que son témoignage surpasse en valeur celui de plusieurs autres langues indo-européennes réunies.
²⁹⁷⁻¹²C’est cette illusion qui a obscurci pendant de longues années des questions de première importance, comme celle du vocalisme primitif.
²⁹⁷⁻²⁸En fait il est extrêmement rare que deux formes de langue fixées par l’écriture à des dates successives se trouvent représenter exactement le même idiome à deux moments de son histoire.
²⁹⁷⁻³¹Le plus souvent on est en présence de deux dialectes qui ne sont pas la suite linguistique l’un de l’autre.
²⁹⁷⁻³³Les exceptions confirment la règle : la plus illustre est celle des langues romanes vis-à-vis du latin : en remontant du français au latin, on se trouve bien dans la verticale ; le territoire de ces langues se trouve être par hasard le même que celui où l’on parlait latin, et chacune d’elles n’est que du latin évolué.
²⁹⁸⁻⁵Mais l’inverse est beaucoup plus fréquent : les témoignages des diverses époques appartiennent à des dialectes différents de la même famille.
²⁹⁸⁻⁷Ainsi le germanique s’offre successivement dans le gotique d’Ulfilas, dont on ne connaît pas la suite, puis dans les textes du vieux haut allemand, plus tard dans ceux de l’anglo-saxon, du norrois, etc. ; or aucun de ces dialectes ou groupes de dialectes n’est la continuation de celui qui est attesté antérieurement.
²⁹⁸⁻¹²Cet état de choses peut être figuré par le schéma suivant, où les lettres représentent les dialectes et les lignes pointillées les époques successives :
²⁹⁸⁻¹⁶La linguistique n’a qu’à se féliciter de cet état de choses ; autrement le premier dialecte connu (A) contiendrait d’avance tout ce qu’on pourrait déduire de l’analyse des états subséquents, tandis qu’en cherchant le point de convergence de tous ces dialectes (A, B, C, D, etc.), on rencontrera une forme plus ancienne que A, soit un prototype X, et la confusion de A et de X sera impossible.
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